• Les ONG religieuses s'activent à l'ONU. Sophie-Hélène Trigeaud, docteur en sociologie (1

    En 2013, le Haut-Commissariat aux droits de l'homme des Nations unies (HCDH) célébrait son 20 anniversaire à Genève. Dans un communiqué, il rappelait sa mission de « promotion et d'amélioration de la dignité, de la liberté et des droits de tous les êtres humains », tout en saluant, en guise de bilan, une vingtaine d'« avancées majeures accomplies ces deux dernières décennies » (www.ohchr.org). Parmi ces avancées, figuraient à la fois l'amélioration de la non-discrimination des peuples autochtones et des minorités, et celle des conditions de liberté d'expression et de non-incitation à la haine ou à la violence par les États. Or, au titre des outils ayant permis de tels progrès, le HCDH mettait en avant les initiatives de promotion du dialogue interculturel.

    C'est justement grâce à la recherche internationale « The Religious NGOs at the UN Project » (Université du Kent, Grande-Bretagne), que nous avons conduit une enquête sur le rôle et la portée des ONG religieuses dans le dialogue interculturel et interreligieux au HCDH. Plusieurs constatations ressortent de cette étude. Tout d'abord, les ONG religieuses engagées au HCDH sont relativement peu nombreuses, au regard du nombre d'ONG bénéficiant d'un statut consultatif à l'ONU. En effet, en 2012, on comptait 239 ONG religieuses parmi les 3 275 ONG en statut consultatif. Ces chiffres ne doivent cependant pas occulter une réalité démographique: chacune de ces entités se rapporte à des parts conséquentes de la population civile internationale. Un cas significatif est celui de l'ONG catholique Vivat International, dont le but est de « promouvoir la compréhension et l'harmonie entre les personnes, les classes et les religions », et qui mène, entre autres combats, celui de la défense des droits des minorités et des peuples autochtones. Cette organisation, dotée d'un statut consultatif spécial depuis 2004, représente à l'ONU « 25 386 sœurs, prêtres et frères, issus de douze congrégations religieuses travaillant dans 122 pays, aux côtés de laïcs et d'autres ONG » (http://vivatinternational.org). Au sein de ces congrégations, celle des spiritains (créée à Paris en 1703) renvoie à 3 000 membres dans 60 pays, notamment en Amérique, Afrique, Océanie et Asie.

    Dans le domaine des relations internationales, comme dans le système onusien, on qualifie de « parapluies » les organisations internationales qui abritent de nombreuses structures locales, en formant ainsi de vastes réseaux transnationaux. Ce phénomène est en plein essor du fait d'une mondialisation croissante. Il implique des mécanismes synergiques de dialogue interculturel qui précèdent les actions de ces ONG au HCDH. De plus, les ONG religieuses sont directement actives en matière de promotion du dialogue interculturel et interreligieux au HCDH, en suivant de multiples voies, depuis un lobbying discret jusqu'à des formes plus officielles de plaidoyer. Elles ont été à l'origine de 56 conférences parallèles sur le thème de la religion, dont 5 sur le dialogue et la solidarité interreligieuse, lors de sessions du Conseil des droits de l'homme entre 2006 et 2011. Pour ces ONG, enfin, l'investissement au HDCH est en soi l'occasion d'un dialogue constant. L'histoire de la défense des droits de l'enfant témoigne à quel point les actions les plus efficaces des ONG religieuses ont requis un maillage complexe d'associations de compétences et de jeux de coopérations entre réseaux d'origines diverses – notamment autour du Bureau international catholique de l'enfance (BICE), qui porta la voix d'un groupe réunissant de nombreuses ONG de confessions variées et laïques, ayant contribué à élaborer la Convention des droits de l'enfant. Cet exemple et ceux qui précèdent précisent en quel sens les initiatives relatives au dialogue sont considérées comme capitales par le HCDH, et en quoi elles ont pu motiver les recherches que nous avons accomplies.


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