• 2010-2011 : La politique autochtone du Chili dénoncée devant les mécanismes de protection et promotion des droits des peuples autochtones de l’ONU.

    Le 20 septembre 2011 dernier, le Rapporteur Spécial sur les droits des Peuples Autochtones James Anaya, présentait ses rapports 2011, correspondant à la période septembre 2010-2011 :

    Un rapport annuel au Conseil des Droits de l’Homme, un rapport sur les industries extractives et leurs opérations au sein ou à proximité des territoires autochtones, un rapport de visites à différents pays (Nouvelle Zélande, Nouvelle Calédonie, République du Congo et Sapmi (Finlande, Norvège et Suède), 3 rapports spéciaux concernant le Costa Rica, Guatemala et Surinam, et un rapport Annuel de communications 2010-2011(en anglais et en espagnol) présentant les cas dénoncés et analysés par le Rapporteur.

    Ce dernier présente deux cas de dénonciation contre le Chili :

    -          L’un concerne l’application de la loi anti-terroriste à des Mapuche (voir un post précédent sur ce site) dans le cadre de mobilisations territoriales ; le Rapporteur recommande à l’Etat chilien de  réformer la loi anti-terroriste afin qu’elle soit en accord avec les définitions précises des types de délits pénaux de terrorisme selon les normes internationales en la matière et conseille « aux différents pouvoirs de l’Etat d’aborder, conjointement avec les peuples autochtones, les motifs de fond de la crise, lesquels sont liés au manque de mise en œuvre des droits des peuples autochtones et en particulier leurs droits sur leurs terres ancestrales, les ressources naturelles, la consultation préalable et la participation aux prises de décisions qui les concernent » (par. 8 du  chapitre). Télécharger l’intégral du chapitre en espagnol.

    -          La seconde concerne la situation du peuple Maori-Rapa Nui à Te Pito O Te Henua (Rapa Nui ; île de Pâques). (Voir un post précédent sur ce site). En l’espèce, le Rapporteur Spécial recommande à l’Etat chilien d’assurer « une véritable représentation du Peuple Rapa Nui, à travers ses institutions représentatives, au sein des espaces de dialogue promus par le gouvernement, afin  d’assurer la résolution effective des affaires présentées par les manifestants. Ainsi, le Rapporteur Spécial espère que seront  évitées de futures actions de violence et que la présence policière à Rapa Nui ne génèrera pas une plus grande sensation de mal-être pour les membres du peuple Rapa Nui ». (Par. 7 du chapitre). Télécharger le chapitre en espagnol.

    Au cours de cette même période de sessions du Conseil des Droits de l’Homme, 3 Mapuche sont intervenus pour dénoncer des violations des droits des Peuples Autochtones:

    Ci-dessous, les contenus de leurs interventions :

    Intervention Jorge Huenchullan Cayul

    Ce résident mapuche de la communauté de Temucuicui, dénonce la présence d’entreprises forestières de plantation de pins et d’eucalyptus, sur les territoires ancestraux qu’ils réclament et les violentes répressions policières  à l’encontre des familles des personnes les plus impliquées au sein des mobilisations de récupération territoriale.  En écho au rapport du Rapporteur Spécial James Anaya, il dénonce la criminalisation des revendications mapuche et l’application de la loi anti-terroriste contre des comuneros pour des délits ne relevant pas de cette catégorie. Lui-même ayant été soumis à 15 poursuites pénales devant les tribunaux de droit commun, 3 autres devant la justice militaire et 3 ans de prison en détention préventive, pour être ensuite  absous de l’ensemble des charges.

    Intervention du Machi Fidel Tranamil Nahuel et de Francisco Painevilo Maldonado

    Ces deux interventions dénoncent les violentes répressions policières menées à l’encontre de villageois (hommes, femmes, enfants et anciens) impliqués dans des mobilisations de récupération territoriale et contre la mise en place de projets de développement en territoire mapuche sans procéder à la consultation libre, préalable et éclairée des communautaires autochtones; il se réfère spécialement à la construction du nouvel aéroport de Makewe.

    Par ailleurs, le mineur Francisco Painevilo Maldonado (16 ans)  révèle avoir été poursuivi il y a deux ans par un hélicoptère, hissé de force dans ce dernier, soumis à des tortures (constatées à l’hôpital) puis menacé d’être jeté de l’hélicoptère s’il ne révélait pas les noms des participants aux mobilisations, sans que la justice militaire se soit prononcée sur ce cas, ni qu’il ait obtenu un suivi psychologique en accord avec sa culture et son âge, ni une réparation morale et matérielle adaptée au préjudice subi. (vidéo de leur entretien)

     

     

    Le Machi Fidel Tranamil Nahuel est le second Machi, autorité spirituelle Mapuche à participer aux mécanismes de l’ONU afin de dénoncer des violations aux droits de l’Homme et aux droits des peuples autochtones.

    En juillet dernier, le Machi Jorge Quilaqueo du lof Huidima était intervenu au sein du Mécanisme d’Experts à Genève et s’était également entretenu avec le Rapporteur Spécial James Anaya.

    Au sein de sa présentation introduite par une invocation en mapuzungun, et s’appuyant sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des Peuples Autochtones,  le Machi Jorge Quilaqueo, revendique le respect du droit à l’autodétermination et à l’autonomie du peuple Mapuche; le respect des traités signés avec la Couronne d’Espagne, puis l’Etat chilien et qui ratifient l’autonomie du territoire mapuche au sud du fleuve Bio-Bio; le respect des autorités traditionnelles mapuche (Longko, Machi, Ngempin, Weipife); celui du droit au consentement et à la consultation libre, préalable et éclairée concernant toute mesure mettant en cause un territoire Mapuche. Il dénonce enfin la criminalisation des revendications mapuche et l’application de la loi anti-terroriste à leur encontre ; concluant sur l’importance de la restitution de la terre et du territoire mapuche comme « base de réconciliation et de remède » entre la Nation Mapuche « vivante » et l’Etat Chilien.  (vidéo de l’intervention).

     

    Par ailleurs, dans un entretien filmé, Erity Teave, membre du Parlement Rapa Nui expliquait les motifs de sa participation au Mécanisme des Experts sur les Droits des Peuples Autochtones.  Tout en dénonçant les violentes répressions policières menées par des forces spéciales spécialement arrivées du continent, à l’encontre de protestations Rapa Nui relatives à la construction d’un hôtel  de propriétaires non Rapa Nui sur l’île, Erity Teave revendique le respect du traité de 1888 signé entre les représentants du Royaume de Rapa Nui et le gouvernement chilien relatif à la souveraineté de l’île et la propriété de ces terres et propose de rénover le dit traité en vue d’assurer  le respect du droit à l’autodétermination du peuple Maori Rapa Nui. (vidéo de l’entretien).

     

    Ces différentes communications provenant de peuples autochtones distincts et de territoires distants, placent différents thèmes communs au sein de l’agenda de la politique autochtone chilienne :

    Le respect du droit à l’autodétermination (art. 3 et 4 de la DDPA), le respect des traités, accords et autres arrangements constructifs (art. 37 DDPA),  le droit au territoire et aux ressources naturelles de ces territoires (art. 25 à 30, 10  et 32 DDPA), le respect des autorités propres autochtones (art. 5, 9, 33, 34 DDPA), le droit à la consultation et au consentement, libre, préalable et éclairé concernant toute mesure qui les concerne (art. 10, 18, 19, 28, 30, 32 DDPA) , la réforme de la loi anti-terroriste et le respect aux droits civils et politiques des peuples autochtones (art. 1 ; 2 ; 22 DDPA).


  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires

    Vous devez être connecté pour commenter