• La préservation des langues indigènes

    La préservation des langues indigènes est une préoccupation de taille sur le continent sud américain. Dans le cadre de "Mucho Chile", campagne pour la promotion et le renforcement de la culture des peuples indigènes au Chili, Radio Universidad de Chile invitait lundi trois expertes pour l'enregistrement d'une émission sur "Les peuples indigènes et les moyens de communication"

    Aymaria, Quechua, Atacameño, Diaguita, Colla, Rapa Nui, Mapuche, Yagán, Kawéskar ... le Chili abrite une multitude de peuples et donc de langues indigènes. Même si elles sont partie prenante de la culture nationale, et malgré un cadre juridique censé les protéger, elles sont aujourd'hui mises en péril. L'enjeu de la préservation des langues indigènes concerne l'ensemble des pays d'Amérique du sud. Avant la colonisation, on dénombrait 1500 langues différentes en Amazonie, maintenant il n'en reste que 240. Le Mexique compte 67 langues - 100 avec les dialectes - mais dans 15 ans, des dizaines auront déjà disparu. La préservation de ces langues est inscrite dans la Déclaration des Droits de l'Homme, y compris dans celle des Droits de l'Enfant. Une Déclaration Universelle de l'UNESCO sur la diversité culturelle a été signée en 2001 par l'ensemble des pays onusiens.

    Dans son article 2, elle dit : "Il est indispensable d'assurer une interaction harmonieuse et un vouloir vivre ensemble de personnes et de groupes aux identités culturelles à la fois plurielles, variées et dynamiques. Des politiques favorisant l'intégration et la participation de tous les citoyens sont garantes de la cohésion sociale(...) le pluralisme culturel est propice aux échanges culturels et à l'épanouissement des capacités créatrices qui nourrissent la vie publique". Dans les faits, il en est tout autrement.
    Assimilation, colonialisme et racisme font partie de l'histoire du Chili, et aucune politique éducative concernant les langues indigènes n'a jamais était mise en place. Elisa Loncon, chercheur en éducation inter-culturelle, explique qu'un soutien politique et économique est indispensable à cette préservation. Elle réclame d'avantage de cours et de publications universitaires en langue indigène. La disparition d'une langue n'est pas seulement déplorable pour la communauté indigène mais pour l'ensemble de l'humanité : à la perte d'une langue correspond la perte d'une certaine vision et compréhension du monde. La préservation de ces langues n'est pas aisée: toutes n'ont pas eu le temps de développer l'écriture avant l'arrivée de l'espagnol, la transmission est donc très difficile. Quand une langue a disparu, si elle n'avait pas développé un système de grammaire, il est impossible de la faire ressusciter.

    Une lutte pour la sauvegarde

    Selon Carmen Valverde, enseignant chercheur mexicaine, les efforts des peuples pour conserver leur langue est peut être plus utile que les initiatives étatiques. Au Chili comme au Mexique, beaucoup d'adolescents et de jeunes adultes se lancent dans un travail de recherche puis de reconstruction; mais pour cela, il est nécessaire d'avoir conscience de son identité.

    Les moyens de communication constituent une véritable opportunité pour préserver ces langues indigènes. En plus d'être bon marché, la radio est par exemple une plate forme d'expression pour les indigènes. Internet constitue un véritable enjeu. S'il peut être très utile à la diffusion de la langue, son accès n'est pas offert à tous. Au Chili, les études montrent que les indigènes constituent la partie de la population la plus pauvre:  ils ne peuvent se payer ce luxe. De plus, pour utiliser le web, il est nécessaire de maîtriser la langue majoritaire. Au Mexique, un groupe d'étudiants a traduit mozilla firefox en maya, avec les difficultés de traduire des concepts qui n'existent pas dans cette langue. Depuis les années 1960, le pays mène des politiques dites "indiginistas". Après deux ans de travail, la constitution a par exemple était traduite en maya. Des "radios communautaires", véritables espaces de télécommunication entre les communautés ont été créées.


    De septembre à décembre, la campagne "Mucho Chile" organisée conjointement par l'UNESCO, la Fondation "Gonzalo Rojas" et "Radio Universidad de Chile", fait la promotion de la culture des peuples indigènes chiliens. Spots radios, forum, rencontres, tout est bon pour sensibiliser la société à la richesse et la diversité culturelle du pays. L'objectif premier et de donner conscience à la population de l'importance de ces cultures dans la formation de la culture chilienne en diffusant le patrimoine des peuples indigènes : la gastronomie, la littérature, l'artisanat, les rites...

     

    Pauline Chambost (www.lepetitjournal.com de Santiago) mercredi 26 octobre 2011


  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires

    Vous devez être connecté pour commenter