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Le peuple Sami, les âmes nature
Au-delà du cercle polaire arctique, au nord de la Norvège, de la Suède, de la Finlande et sur la presqu'île de Kola en Russie vivent, estime-t-on, quelque 70 000 Samis. Samis, et pourquoi pas Lapons, comme on les nomme communément ? Sami vient de Sapmi qui signifie l'ensemble de leurs territoires et Lapon se rapproche du finnois lapp plus ou moins synonyme de "porteur de haillons". Des Samis unis par une même langue finno-ougrienne à neuf dialectes et une même histoire vieille de plus de dix mille ans.
Les vestiges archéologiques tendent à montrer que les Sami vivent dans les régions arctiques depuis des millénaires. Les Sami d’aujourd’hui tiennent à préserver leur riche culture et leurs traditions ancestrales, mais ils sont heureux d’utiliser la motoneige plutôt que les skis pour l’élevage du renne.
Tentes traditionnelles à côté de l’enclos des rennes dans un village sami.Le pays sami – Sápmi – s’étend sur le nord de la zone arctique de la Scandinavie et sur la péninsule de Kola en Russie. Les Nations Unies ont reconnu aux Sami le statut de peuple autochtone qui leur confère le droit de préserver et de développer leurs artisanats, leur langue, leur éducation, leurs pratiques d’élevage du renne, leurs traditions et leur identité. Il n’existe pas de recensement des Sami, mais leur population est estimée à quelque 70 000 personnes disséminées dans quatre pays : approximativement 20 000 en Suède, 40 000 en Norvège, 6 000 en Finlande et 2 000 en Russie (dans la péninsule de Kola).4
Un peuple nomade
Les Sami étaient à l’origine nomades, vivant sous la tente en été et dans des huttes de tourbe plus solides pendant la saison froide. Certains continuent de vivre sous la tente, mais la plupart ont des logements modernes. Beaucoup sont partis s’établir dans le sud de la Suède. Aujourd’hui, dix pour cent seulement des Sami suédois vivent de l’élevage du renne, l’activité familiale étant souvent complétée par le tourisme ou la pêche.
L’élevage du renne
Les Sami, parfois appelés le « peuple des huit saisons », vivent au rythme des phases de l’élevage du renne – mise bas, marquage, comptage, castration et abattage – qui ont chacune leur saison.
Les changements intervenus dans les droits de pacage et l’exploitation des terres forestières ont conduit à de nouvelles formes d’activités. En 2011, la Cour suprême a donné gain de cause aux Sami en reconnaissant leurs droits coutumiers sur certaines terres. C’est peut-être l’arrêt le plus important des temps modernes sur les questions juridiques concernant les Sami.
L’élevage du renne se limite aujourd’hui en grande partie à la production de viande. Lors de la transhumance traditionnelle, les éleveurs et leur famille accompagnaient leurs troupeaux à pied ou à ski. Désormais, beaucoup utilisent des motoneiges, des camions ou des hélicoptères, mais quelques-uns préfèrent encore le cheval.
Économie et politique
Une partie des Sami vivent en montagne, d’autres dans des villages forestiers. Le village sami est une entité économique et administrative créée pour les besoins de l’élevage du renne et régie par la loi suédoise sur l’élevage du renne. Chaque village compte plusieurs élevages et dispose d’une aire de pacage séparée et clôturée. Beaucoup d’éleveurs s’occupent aussi de rennes dont les propriétaires travaillent ou vivent loin du village.
Vers la fin du XIXe siècle, un grand nombre de Sami se sont sédentarisés pour pratiquer une activité mixte associant l’agriculture et l’élevage du renne. Cependant, du fait de l’ancien mode de vie nomade de certains d’entre eux, les autorités ont été amenées à prendre des décisions controversées dont les effets se sont fait sentir pendant une bonne partie du XXe siècle. La loi de 1928 sur le pâturage des rennes limitait le droit de posséder des rennes et l’appartenance à un village sami aux éleveurs et à leur famille. Les nouvelles restrictions avaient pour conséquence que les éleveurs pratiquant l’exploitation mixte devaient abattre leur rennes ou perdaient le droit de les marquer.
L’élevage du renne est souvent une affaire de famille.Aujourd’hui, les jeunes générations trouvent d’autres métiers et les Sami s’efforcent d’assouplir les réglementations pour permettre l’appartenance à un village Sami sans avoir à être propriétaire de rennes.
La langue sami
Les Sami ont leur propre langue, qui est parlée en Suède, en Norvège, en Finlande et en Russie. Elle est subdivisée en trois dialectes principaux : le sami du nord, dans la région la plus septentrionale, le sami de Lule autour de Jokkmokk, Gällivare et une partie de Tysfjord en Norvège, et le sami du sud dans le Västerbotten, le Jämtland et à proximité de la limite géographique du Sápmi en Härjedalen et en Dalécarlie.
Le gouvernement suédois a donné au Sameting, l’Assemblée sami, une influence accrue et des moyens financiers pour préserver la langue sami. Dix-huit communes ont été constituées afin de protéger, promouvoir, préserver et développer la culture sami, et des groupes consultatifs doivent y être mis en place.
Environ 6 000 Sami parlent leur langue maternelle – le sami du nord pour 90 pour cent d’entre eux.
Le sami est une langue riche. Il existe par exemple plus d’une centaine de façons de désigner la neige. Mais si les termes descriptifs abondent, il n’y a pas de genres : ainsi, le pronom personnel son s’utilise indifféremment pour un homme ou une femme, et peut désigner un animal ou un objet.
Jusqu’à 1950, le sami écrit ne concordait pas avec l’alphabet suédois. Depuis, sept lettres complémentaires y ont été ajoutées pour représenter des sons zézayants qui n’existent pas en suédois et des règles d’orthographe ont été publiées en 1979. Tout cela explique sans doute en partie pourquoi un bon nombre de Sami âgés ne savent ni lire ni écrire leur propre langue.
Le costume traditionnel plaît aussi aux jeunes
La fierté du patrimoine sami se reflète entre autres dans le port du costume traditionnel, en particulier le kolt, autrefois vêtement de travail, devenu maintenant une tenue de fête. Il en existe diverses variantes selon l’origine géographique. Traditionnellement bleus, les costumes sont d’au moins douze types, avec des modèles différents pour les hommes et les femmes. Certains redessinent leur costume en utilisant des motifs caractéristiques propres à leur famille. La mode contemporaine a aussi son impact. Les jeunes Sami tendent à préférer un style traditionnel en soie de couleurs vives.
Les jeunes Sami préfèrent la soie de couleurs vives pour leur tenue traditionnelle.Le kolt est toujours porté dans les grandes occasions, baptêmes, enterrements, mariages, confirmations. La version masculine est plus courte que la féminine, mais tend à être plus longue dans le sud du Sápmi que dans le nord. Ceinture, chaussures lacées, châle ou plastron, faux col et bonnet sont parmi les accessoires du kolt. Ce col, autrefois destiné à protéger du vent, tend à devenir aujourd’hui une cape décorée. Il est porté par les hommes dans le nord et par les femmes dans le sud. Les garnitures varient, mais les Sami de Lule préfèrent en général l’argent ou l’étain, les Sami du sud les perles et les Sami du nord tissus de couleur vive bordés d’un galon.
Éducation
Un centre d’éducation sami, de niveau secondaire, a été fondé en 1942. Aujourd’hui établi à Jokkmokk, dans le nord de la Suède, il propose des formations à l’élevage du renne, à la cuisine traditionnelle, à l’artisanat et à la langue sami. Il a le statut de fondation, avec un conseil d’administration composé de membres des associations sami SSR et RSÄ, ainsi que de la commune de Jokkmokk.
Les élèves vivent en internat pendant les périodes scolaires et disposent de locaux d’étude et de travail modernes.
Il y a six écoles sami en Suède : à Karesuando, Lannavaara, Kiruna, Gällivare, Jokkmokk et Tärnaby, dans le sud du Sápmi.
En Suède, des formations supérieures en langue sami sont dispensées par les universités d’Umeå et d’Uppsala. Le centre de recherches sami (CeSam), à Umeå, coordonne les recherches sur la culture, la langue, l’histoire et les communautés sami, et prend l’initiative de nouvelles recherches.
Des établissements préscolaires sami contribuent aussi à entretenir la langue sami et à la transmettre à la jeune génération. Il en existe dans certaines communes. Des parents ont formé des crèches coopératives telles que Vaerien Maanah (Enfants des montagnes), fondée en 2010 dans le sud du Sápmi.
Les traditions sami se transmettent par l’école maternelle sami, publique ou coopérative.Le Sameting, parlement sami
L’action politique des Sami pour accroître leur influence et leur autonomie a commencé dans les années 1950 avec la création d’associations sami. Aujourd’hui, les Sami sont largement représentés par quatre organisations : un parti politique (LSS), deux fédérations nationales (RSÄ et SSR) et une organisation de jeunesse, Saminuorra. Axées sur différents centres d’intérêts, elles jouent pour l’essentiel un rôle de groupes de pression.
Depuis 1993, les Sami ont leur propre organe parlementaire élu par la population, l’Assemblée sami (Sameting), qui a pour mission de défendre, promouvoir et coordonner toutes les questions d’intérêt pour les Sami.
L’Assemblée sami est élue tous les quatre ans. Elle a 31 membres, qui se réunissent trois fois par an dans différentes localités de Suède. Au long des années, la représentation des partis politiques a évolué, tant pour l’orientation que pour le nombre. Le Sameting est financé par des subventions du gouvernement suédois et compte un représentant politique employé à plein temps, son président.
Le droit de vote appartient à ceux qui sont inscrits sur les listes électorales sami, ouvertes aux personnes qui parlent la langue sami à leur foyer et qui se réclament de l’appartenance à la société sami. Le nombre d’électeurs inscrits a augmenté ces dernières années, en particulier par suite de l’intérêt grandissant des jeunes Sami pour les questions politiques et d’une tendance accrue des plus âgés à accepter leur ethnicité.
Vers plus d’autonomie
Le Sameting a exprimé le souhait de construire une maison parlementaire d’inspiration sami à Kiruna.
Parmi les diverses questions à l’ordre du jour, un objectif fait l’unanimité dans les partis politiques : une plus grande autonomie. Actuellement, le Sameting n’est habilité à traiter que les affaires concernant la chasse et la pêche, l’élevage du renne, l’indemnisation des dommages causés par les prédateurs, la langue et la culture sami.
Les parlements sami de Finlande, de Norvège et de Suède ont élaboré une convention nordique commune afin de renforcer leur position en tant que peuple minoritaire et peser sur les décisions relatives aux affaires sami.
Voies nouvelles et traditions anciennes
Le Sameting a donné aux Sami des moyens de défendre leur culture, leurs traditions et leur langue en faisant de certaines communes des centres administratifs. Cela leur a apporté de nouvelles possibilités de promouvoir leurs intérêts, notamment par l’engagement de personnel de langue sami dans les maisons de retraite, l’enseignement de l’histoire sami à l’école de base et des panneaux d’information en sami dans les écoles et autres bâtiments publics.
Un autre centre d’intérêt est la cuisine traditionnelle sami. Les anciennes générations avaient coutume d’utiliser toutes les parties du renne et la viande était un élément essentiel de leur alimentation. Bien des jeunes Sami veulent redécouvrir des plats en voie de disparition et les recettes locales traditionnelles ont trouvé de nouveaux adeptes, chez les Sami comme chez les non-Sami. Et des mets classiques sont revisités avec une touche d’innovation – le carpaccio de renne, par exemple.
Duodji, l’artisanat sami
Le renne est au coeur de la culture sami, il fournit la nourriture et les matières premières des objets usuels. Les Sami transmettent leur connaissance du renne par l’enseignement formel, mais aussi par le contact direct d’une génération à l’autre. Traditionnellement, rien n’était jeté, la peau et les bois servaient à faire des chaussures et des couteaux, la viande était consommée immédiatement ou transformée.
Les produits de l’artisanat sami, duodji, sont faits de matériaux naturels. Ils ont souvent des formes doucement arrondies, agréables au toucher mais fonctionnelles. Une ornementation raffinée était et reste importante pour mettre en valeur l’habileté de l’artisan et perpétuer les modèles familiaux et culturels.
Beaucoup de Sami font de l’artisanat pour améliorer leurs revenus, mais rares sont ceux qui peuvent en vivre. Un label de qualité garantit à l’acheteur l’authenticité des produits de l’artisanat sami et atteste que leur créateur est un artisan reconnu.
Des styles et des matériaux nouveaux ont fait leur apparition dans l’artisanat sami, qui emploie aujourd’hui une gamme de techniques comme le moulage des métaux, les arts visuels et la photographie. Plus la forme d’art est moderne, plus elle est accessible aux jeunes Sami.
Musique, théâtre et danse
Le joik est un chant traditionnel, à l’origine étroitement lié à la religion sami. Considéré comme une pratique païenne et barbare, il a longtemps été interdit par les autorités.
Le joik, qui peut décrire une personne ou une chose, se transmet de génération en génération. Son style est déterminé par son origine. Le joik des Sami du sud est mêlé de cris d’animaux, celui du nord est souvent la description d’un lieu.
La chanteuse Sofia Jannok au festival de jazz de Stockholm.La musique sami d’aujourd’hui est un mélange de joik, de rock et de musique contemporaine. Sofia Jannok, par exemple, a interprété le tube d’ABBA Waterloo en sami pour la sélection suédoise du concours Eurovision de la chanson 2011. Mari Boine et Wimme Saari sont d’autres chanteurs qui allient joik traditionnel et pop. Nils-Aslak Valkeapää, plus connu sous le nom de Áillohaš, a vu très tôt le joik comme un art et a composé de nombreuses oeuvres poétiques.
Le théâtre est une expression artistique plus récente, souvent inspirée de légendes ou récits d’autrefois. La grande tradition des conteurs sami a trouvé de nouvelles perspectives avec le théâtre. Le Théâtre sami de Giron (nom sami de Kiruna) monte chaque année plusieurs productions.
le territoire des samis
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